Comment lutter contre les violences sexuelles faites aux enfants ?
Les actes de violences de toutes formes envers les enfants ont toujours existé. Seulement aujourd'hui, ils sont de plus en plus visibles et audibles, les victimes ayant de plus en plus de moyens pour se faire entendre. Face à cela, notre responsabilité est individuelle et collective. Familles, professionnels, adultes, nous devons œuvrer afin d'accorder aux enfants le droit de grandir dans une société qui les considère comme un sujet de droit et qui leur donne les moyens d'agir et de parler en cas de danger.
Pour moi, cela passe par le droit à l'information au développement affectif, relationnel et sexuel d'un enfant et voici pourquoi:
Qu'est-ce que la vie affective, relationnelle et sexuelle d'une personne ?
Définition et terminologie
Selon la Haute Autorité de Santé, la vie intime, affective et sexuelle (VIAS) est une composante de la dignité humaine qui est une de nos libertés fondamentales.
L'Organisation Mondiale de la Santé quant à elle, indique que la santé sexuelle s'entend comme « ...un état de bien-être physique, mental et social eu égard à la sexualité, qui ne consiste pas seulement en une absence de maladie, de dysfonctionnement ou d'infirmité. La santé sexuelle s'entend comme une approche positive et respectueuse de la sexualité et des relations sexuelles, ... » (2006).
J'aborde la notion de sexualité pour les enfants, loin de notre regard d'adulte, biaisé par nos comportements et la culture ambiante actuelle. La sexualité d'un enfant concerne son identité biologique, ses caractéristiques corporelles et hormonales et fait partie intégrante de son développement en tant qu'être humain. Elle n'est donc pas mature, pas aboutie, et il est important d'avoir cette information en tête lorsque des comportements sexuels ont lieu et qu'il faut les appréhender.
Statistiques actuelles sur les violences sexuelles infantiles
En France, le coût de l'inaction et du silence est cher pour les enfants :
Toutes les semaines, un enfant meurt sous les coups de ses parents.
1 enfant est victime d’inceste, de viol ou d’agression sexuelle toutes les 3 minutes.
Chaque année, 1 enfant sur 7 est victime de violences dans le sport.
31% des parents déclarent que leur enfant a été au moins une fois victime de cyberviolence au cours de sa vie.
Un enfant en situation de handicap a 3 fois plus de malchance d’être victime.
100% des enfants sont poly-traumatisés.
Sources : Campagne nationale de lutte contre les violences sexuelles faites aux enfants - Septembre 2023
Plan de lutte contre les violences faites aux enfants 2023-2027
Il n'y a pas de différence de genre pour les victimes. Les filles comme les garçons sont concernés et l'âge moyen des victimes d'inceste est de 5 ans. Malheureusement, on estime que ces chiffres ne sont pas représentatifs de la réalité, les victimes silencieuses étant nombreuses (amnésie traumatique, loyauté à la famille, difficulté à reconnaître d'avoir été victime, poids du silence pour les hommes qui ont été abusés, coût économique et mental d'engager des procédures etc...).
Causes et facteurs de risque des abus sexuels sur mineurs
Il y a, selon moi, énormément de causes qui font que les enfants sont victimes d'abus et de violences, et ce, partout dans le monde. La première cause est la notion d'autorité et de pouvoir : un enfant est un être vulnérable qui dépend d'un ou de plusieurs adultes pour survivre. Cela est une brèche dans laquelle certains adultes s'engouffrent pour pallier à une deuxième cause : un mal-être psychologique.
La santé mentale est un enjeu majeur des dernières décennies, et cela commence dès l'enfance. Ce sujet est mis en lumière avec des articles concernant la harcèlement, dont les services publiques, professionnel.le.s et les familles commencent à mesurer l'impact. Mais le bien-être psychologique est lié à beaucoup de facteurs et les enfants sont les premiers à payer les pots cassés.
Conséquences des violences sexuelles sur les enfants
Les conséquences des violences sexuelles sur les enfants sont multiples. Statistiquement, chaque famille a/a eu en son sein une victime. Le travail d'enquête de la CIIVISE a permis de mettre concrètement en lumière les impacts et coûts des violences sexuelles sur les enfants en France.
Impact psychologique et émotionnel
Un cerveau en construction qui a subit un traumatisme lié à une agression sexuelle ne se développera pas de la même manière qu'un cerveau lambda. Les connexions neuronales vont créer des systèmes de protection pour la survie de la victime.
Se construire en tant qu'être humain quand on a été victime dans son enfance, c'est gérer avec une estime de soi inexistante, une confiance dans les adultes altérée, une vision de la vie trop sombre, des connaissances sur les rapports humains inappropriées...
Effets à long terme sur le développement
Les protections instinctives du cerveau impacteront beaucoup de domaines de vie de la victime plus tard, et peuvent apparaître sous plusieurs formes : dépression, maladie auto-immune, tentative de suicide, addiction, anxiété ...
Les liens entre la victime et elle même, la victime et les autres, la victime et l'écosystème auquel elle fait partie sont altérés.
Plus tôt sont prises en charge les victimes, plus "facilement" elles apprendront à vivre avec ce qu'elles ont vécu.
Prévenir et réagir face aux violences sexuelles sur enfants
Je tiens à être claire : personne ne peut empêcher un.e agresseur.e d'approcher un enfant. Je rappelle que la très grosse majorité des agressions ont lieu dans le cercle privé, et non dans la rue. Quelqu'un qui agresse un enfant sexuellement le fait parce qu'il/elle a un ascendant sur l'enfant. Une des propositions faîtes pour prévenir ce genre de situation, est de rendre son pouvoir à l'enfant.
Stratégies de prévention et sensibilisation
Le principe de la prévention est de parler de pratiques qui permettront de réagir face à un danger. La sensibilisation passe par l'information.
Les stratégies de prévention et sensibilisation sont pour enfants et adultes, mais ne se traduira pas de la même manière car les deux ne s'appliqueront pas pareil sur le moment. Néanmoins, le chemin est aussi important pour les deux : enfant et adulte.
Un enfant qui a confiance en un adulte croira ce qu'il dit. Il croira au Père Noël, à la petite souri, il croira aussi l'adulte qui lui dit qu'il/elle est nul.le, méchant.e. Donner les outils nécessaires aux enfants pour qu'ils voient ce dont ils sont capables, pour qu'ils sachent que les adultes n'ont pas toujours raison et que certains adultes leur veulent même du mal, est pour moi essentiel. Je sais que ça n'arrange pas forcément certaines situations qu'on aimerait voir se régler rapidement si l'enfant "obéit sans poser de question". Mais votre lien sera basé sur la confiance et la coopération, plutôt que sur la crainte et la domination. Cela demande à l'adulte de se regarder avec humilité et de choisir de préserver le lien avec l'enfant plutôt que l'image qu'il a de lui-même/elle-même par exemple, et c'est difficile. Mais c'est possible, et même, essentiel car nous parlons de long terme.
Actions immédiates et long terme
Si un enfant rapporte une situation d'agression (par un adulte ou un autre enfant), il est indispensable d'agir immédiatement.
Commencer par dire "Merci de me l'avoir dis, je te crois, je te protège" comme le suggère le juge des enfants et co-président de la CIVIISE, Edouard Durand, cela amènera immédiatement un sentiment de soutien et de soulagement à la victime. En fonction de la gravité que vous estimez, vous pouvez questionner la victime sur les circonstances et laisser surtout un espace disponible entre vous pour qu'elle se confie. Ne pas forcer, car s'il y a des procédures, la victime devra raconter plusieurs fois son agression et cela est très coûteux psychologiquement. Reposez-vous sur les autorités compétentes, entourez-vous, et si malheureusement la parole de la victime n'est pas entendue, ne lâchez rien.
Le chemin est encore long en France et il est possible que vous n'obteniez pas le soutien que vous espériez des institutions publiques. Il est normal et indispensable si des poursuites judiciaires se mettent en place, de s'entourer. Néanmoins, n'oubliez pas la victime, continuez de rester en lien avec elle, qu'elle se sente exister autrement qu'en tant qu'agressée. Les liens avec celles et ceux qui l'aiment et l'entourent feront partie du matelas de sécurité sur lequel l'enfant pourra se reposer.
Pour les adultes qui veulent agir
Je forme sur Marseille des professionnel.le.s de l'enfance, de la justice, du social où parlons plus en détails de ce que vous avez lu dans cet article. J'aborde la prévention des violences sexuelles sur les enfants en passant par l'information sur leur développement de 0 à 12 ans. Je veille aussi à parler de la notion de "préservation" des adultes confrontés à des cas d'agression, en évoquant le repos du système nerveux et de prendre soin de soi. Car un adulte qui ne sait pas s'écouter aura du mal à écouter une victime.
Je propose pour les familles des consultations privées, qui permettent de rassurer, d'informer et d'accompagner s'il y a eu des cas de violences, ou s'il y a des questionnements sur le développement de leur(s) enfant(s).
J'interviens dans des établissements sur des sujets spécifiques (cybercriminalité, accompagner son enfant dans on développement, pornographie, réunion pour instaurer un dialogue familles/établissements scolaires sur le programme EVARS, etc...).
Enfin, je participe à des conférences sur les différents sujets liés à mon champs d'expertise.
N’hésitez pas à me contacter pour me parler de vos problématiques !